11/11/2008
11 novembre.
Ce mardi matin, le soleil brille sur la campagne hier balayée par la tempête et les monuments aux morts sont tous fleuris, en présence de quelques drapeaux et des édiles locaux, mais aussi de quelques jeunes chargés de représenter les nouvelles générations, celles qui n’ont pas connues la guerre et pour lesquelles elle est une réalité lointaine, voire une simple virtualité vécue à travers un écran de télévision ou de jeu électronique. Et pourtant, la guerre n’est malheureusement pas si loin et un général rappelait ce matin sur France Culture que 12.000 soldats français étaient, de par le monde, engagés dans des opérations de guerre, en particulier en Afghanistan. Mais l’éloignement du champ de bataille, assez similaire à celui que connurent les générations du siècle de Louis XIV (les guerres louisquatorziennes se déroulant au-delà des frontières de notre pays, comme celles de Louis XV d’ailleurs, et touchaient peu, concrètement, les populations, hormis par les impôts), nous garantit une grande impression de paix et de calme, et les guerres picrocholines au sein du Parti socialiste n’y changent évidemment rien…
La guerre s’est certes et heureusement éloignée, spatialement parlant, de l’Europe de l’Ouest, et la réconciliation franco-allemande a scellée une amitié qui, jadis, pouvait sembler improbable, voire impossible. On doit d’ailleurs beaucoup plus cette réconciliation aux gestes des Etats eux-mêmes qu’à cette « Europe » dont on voudrait nous faire croire que c’est sa simple construction qui a fait reculer le danger de la guerre : De Gaulle et Adenauer, Mitterrand et Kohl, ont plus fait pour la paix et l’entente entre les peuples (parce qu’ils ne les niaient pas, ni l’histoire qu’ils avaient fait ou vécu) que Monnet ou Schuman, guidés par une sorte de millénarisme européiste, par une idéologie qui négligeait les faits et les sentiments des nations et de leurs peuples…
Eric Zemmour faisait aussi remarquer il y a quelques années que c’était « la paix qui a permis la construction européenne » et non l’inverse comme on voudrait nous le faire avaler pour des raisons pas toutes louables…
L’histoire n’est pas qu’une matière scolaire ou une science, elle est aussi une tragédie, avec ses drames et ses espoirs, ses erreurs et ses vérités, ses acteurs et ses victimes : elle s’inscrit aussi bien sur les pages des livres que sur le marbre des tombeaux, dans le cœur des hommes que dans leur mémoire parfois incertaine ou rancunière…
Ce matin, au soleil de novembre, je relis ces quelques mots anodins et pleins d’espoir d’un soldat qui va mourir quelques heures après et qui ne le sait pas… Au cœur de la guerre, il y a toujours l’espérance de la vie, du lendemain, du soleil. Et, aujourd’hui, au cœur d’une paix qui n’est jamais totalement certaine, le souvenir de ceux qui nous permettent, par leur sacrifice lointain et parfois oublié, d’être ce que nous sommes, d’être une nation libre : « De toutes les libertés humaines, la plus précieuse est l’indépendance de la patrie », affirmait avec raison Charles Maurras. Sans cette liberté de la nation, de la Cité au sens grec du terme, aurions-nous, pourrions nous exercer les autres ? Les périodes sombres des défaites et des occupations nous répondent par la négative. Nous devons beaucoup aux Français d’hier, y compris parfois leurs erreurs… Il nous reste à inscrire dans l’Etat, non pas le ressentiment toujours belligène, mais la liberté que peuvent donner la durée incarnée et l’indépendance héritée. Un Etat couronné qui assume le passé, toutes les mémoires de la nation, et qui regarde vers le lointain et vers le lendemain, en veilleur protecteur et bienveillant envers les siens…
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